Actualité des recherches préhistoriques dans les grottes de la vallée de l'Erve
Par Romain Pigeaud (Docteur en archéologie UMR 5198 du CNRS, département de préhistoire du MNHN)
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Le « chêne pétrifié » et une légende noire attirent 20 000 visiteurs par an Il s’agit de la cavité la plus visitée du site (près de 20 000 visiteurs par an). Les touristes sont attirés par les concrétions stalagmitiques d’une forme amusante (le « chêne pétrifié ») et surtout par la légende noire de la « fée Margot ». Mentionnée pour la première fois en 1701, l’entrée de la cavité devait être connue depuis très longtemps. La grotte était d’accès difficile : l'orifice de l'entrée avoisinait les 50 centimètres; il fallait ramper ensuite à plusieurs endroits. D’après les textes, de nombreux accidents tragiques semblent d’ailleurs s’être déroulés dans la cavité. La grotte Margot est la cavité qui a le plus souffert, et des fouilles anciennes, et de l’exploitation touristique. Les anciennes fouilles qui y furent intensément pratiquées ont révélé la présence de Moustérien (dont, en Europe occidentale, l’artisan est Néandertal), d’Aurignacien, de Solutréen et de Magdalénien, ainsi que d’une tanière d’hyène et d’un repaire d’ours. Le plancher stalagmitique sur lequel évoluaient les hommes du Paléolithique supérieur a été brisé. Si bien que, dans la plupart des salles et des couloirs, les représentations se situent au-dessus du visiteur, ce qui a contribué à les préserver. Margot semble avoir été une grotte couloir, où la progression se faisait en rampant (comme autrefois dans les Combarelles 1, en Périgord, ou aujourd’hui encore, dans la grotte de Pergouset, dans le Lot). Le visiteur ne pouvait se relever vraiment que dans quelques salles, distantes entre elles de plusieurs dizaines de mètres. La cavité s’achevait par une sorte de « précipice », partiellement ennoyé aujourd’hui, où l’on descend maintenant par un escalier taillé dans la pierre.
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En effet, d’autres représentations répertoriées, comme les rondes-bosses de Hohle Fels (Allemagne) et de Mal’ta (Sibérie), ne sont pas clairement diagnostiquées et pourraient fort bien représenter d’autres ansérinés (oies, bernaches), voire, dans le cas d’un statuette de Mal’ta (Sibérie), un Ardéidé (héron). Les deux cygnes inventoriés sont donc celui, sur galet, de Gourdan, et celui, sur os, de Teyjat (Périgord). Le cygne de la grotte Margot est donc le premier cygne représenté sur la paroi d’une grotte ornée. Les autres représentations (y compris celles d’Allemagne et de Sibérie) sont toutes des rondes-bosses ou des gravures mobilières. Au contraire des corvidés, oiseaux sédentaires, le cygne est un oiseau migrateur. Il s’agit d’une espèce d’origine boréale, contrainte de transposer son aire de nidification plus au sud, en raison des périodes glaciaires. A l’heure actuelle, les aires d’hivernage du cygne se situent au nord-ouest de l’Europe. Il est admis, en effet, que ce n’est que pendant leur hivernage que les hommes préhistoriques « français » ont pu apercevoir ces oiseaux. La présence de cygnes en Mayenne, et plus précisément dans la vallée de l’Erve, est une indication supplémentaire de la douceur du climat qui devait régner dans le « canyon » de Saulges, qui servait à cette époque de zone refuge pour tout le Massif Armoricain.
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Le second art paléolithique mayennais a-t-il son origine outre-Rhin ? La découverte des représentations de la grotte Margot relance de ce point de vue la question des influences septentrionales. En effet, c’est tout un ensemble de grottes ornées d’époque tardiglaciaire qui émerge à présent : la grotte de Church Hole, en Angleterre, les grottes de Gouy et d’Orival en Seine-Maritime, les grottes de Boutigny et des Trois Pignons, l’abri du Croc-Marin, en Essonne, la grotte de Hohle Fels, en Allemagne. Quelles sont leurs relations entre elles ? Existe-t-il un rapport entre les territoires symboliques et l’évolution des cultures préhistoriques dans cet espace géographique ? Par ailleurs, la proximité des décors et des styles permettent de rapprocher les gravures de Margot de celles du site de Gönnersdorf (Allemagne). Nul besoin de chercher des influences depuis le sud-ouest, contrairement à Mayenne-Sciences, clairement d’influence quercinoise. L’origine du second art paléolithique mayennais est peut-être à chercher de l’autre côté du Rhin. |